Ce début d'après-midi, j'avais des photos à prendre pour un article du journal. Il y avait une compétition de surf à couvrir sur Huntington beach, et j'étais celui qu'on avait choisi pour les photos. Le soleil, le monde, les encouragements, la musique bien trop forte pour être agréable... tout me donnait envie de partir au plus vite. Pourtant, j'avais de nombreuses photos à prendre, à commencer par la plus importante, celle du vainqueur. J'allais donc devoir me faire violence et patienter dans ce brouhaha et cette cohue. C'était la première fois depuis longtemps que j'étais entouré d'autant de monde, d'autant d'humains. J'avais prit l'habitude d'éviter les endroits bondés, et éviter les gens de manière générale.

J'aurais presque cru que mon patron me jouait un tour tordu, en m'envoyant sur cette mission. Mais il n'avait aucune idée de ce que je vivais, ce qui j'étais ou... ce que je pensait de tout ça et de la foule en ce moment. Non, c'était seulement un mauvais coup du sort. Ou une putain de malchance. Je levais une énième fois mon appareil, photographiant des groupes de supporters, et l'océan à l'horizon, sur lequel surfait un des compétiteurs. Ce soir, il me faudrait parcourir toutes ces photos et les trier, mais... plus j'en prenait, moins j'avais de chances de réfléchir ou d'être accosté par qui que ce soit. Alors que continuais à mitrailler tout et n'importe quoi. J'en était probablement à la cinquantième photo, quand mon objectif s'était posé sur des cheveux blonds et un visage que je ne connaissais que trop bien.

« Katie... »

Soufflais-je en baissant l'appareil qui avait immortalisé l'expression de son visage quand elle m'avait repéré. Putain de coup du sort... Tonnais intérieurement en sentant tout mon être lutter face à ce moment qui allait forcément s'avérer difficile.

« Salut, tu aimes le surf maintenant ? » Fis-je sans réel entrain, me forçant à faire la conversation et échanger des banalités pour éviter les sujets douloureux.

« Ou c'est pour ton job ? Comme moi ? » Ajoutais-je en soupesant mon appareil photo comme pour lui éviter de me poser la question. Éviter un sujet facile et tout sauf douloureux... très bonne idée ! Songeais-je, regrettant déjà d'avoir épuisé plusieurs bonnes échappatoires.

C’était encore une foutue journée ensoleillée à Los Angeles. Le genre de journée qui ne collait généralement pas avec l’humeur irritable de la démone. Rien ne semblait avoir changé depuis la dernière fois où elle était de passage dans la ville des Anges. La blonde était toujours en train d’occuper une chambre d’hôtel, en espérant que ce ne serait que temporaire, mais cela faisait maintenant des mois. Des mois qu’elle n’avait pas eu de nouvelles de lui. Elle enchaînait machinalement les entrevues de nuit à la radio, et se demandait si elle avait réellement bien fait de revenir. Bien entendu, il le valait la peine, après tout, il n’avait eu que lui, mais cette profonde tristesse qui l’habitait ne semblait s’estomper.

Dans l’espoir de se changer les idées, la démone avait enfilé un top de sport qui couvrait l’essentiel et des leggings de couleur sombre, et était partie courir dans les rues de la ville. C’était après plusieurs minutes, et la tête toujours pleine que Katie gagna la plage. Peut-être que c’était un foutu coup du destin, ou bien sa chance habituelle, mais au beau milieu de tous ces êtres qui s’étaient éparpillés au milieu du paysage, elle y trouva un visage familier. Connor. Et dire que la course aurait dû la détendre. Encore une blague du destin.

Katie s’était approché de lui, puisque de toute façon, il était trop tard pour feindre qu’elle ne l’avait pas vu et fuir. Il l’avait salué de manière cordiale, mais sans entrain ce qui lui donnait toujours une drôle d’impression. Le fait de le voir lui rappelait tout ce qui lui manquait chez lui, son odeur, son sourire, son étreinte… « Salut » fit-elle simplement en tâchant de garder pour elle ses pensées qui ne faisaient qu’alourdir son cœur déjà bien lourd. « Probablement autant que toi » fit-elle avec un léger sourire amusé alors qu’elle constatait son manque d’intérêt pour ledit sport.

« Non, j’avais envie de courir un peu » répondit-elle simplement alors qu’il brandissait son objectif. « Les surfers sont en dehors de ma ligue en ce moment. Tu savais pas? Je n’interviewe que des gens intéressants dernièrement… des centenaires qui ont la passion du tricot, des auteurs de romans de merde que je suis forcé de lire et les pires, des coachs de vie. » La blonde s’était laissé emporter dans ce dégluti de mots, éprise d’un sentiment violent avant de réaliser qu’il devait supporter bien pire. « Je suis désolée. Je voulais me calmer et visiblement la course n’est pas le meilleur des moyens » ajouta-t-elle d’un rire nerveux. « Comment tu vas? » demanda enfin la démone alors qu’elle plongeait son regard dans celui du déchu.

Depuis notre rupture, toutes nos discussions étaient similaires. Des platitudes, de la gêne, des politesses... Tout était question de ne pas faire souffrir l'autre davantage. Mais... le processus semblait s'avérer complètement inefficace. Je la regardait, conscient d'avoir lancé un énième sujet insipide et puis... la conversation avait subitement changé. Son discours était devenu plus personnel et elle semblait presque agacée en me parlant de son nouveau statut au travail.

J'ignorais si c'était à cause de ces discussions forcées et presque scriptées qu'on s'imposait, ou si elle avait eu quelque chose dans sa vie pour justifier la chose, mais la colère qui devait l'habiter à ce sujet s'était intensifier sans crier gare. Surpris je n'avais d'abord rien dit, jusqu'à ce qu'elle me présente des excuses.

« Ce n'est rien. J'imagine que ce n'est pas agréable de faire un bond en arrière comme ça dans ta carrière. » Un instant, j'avais pensé resté la dessus et ignorer sa question suivante. Mais ça n'était pas mon genre et elle était en droit de savoir, selon moi. Pourtant... j'ignorais quoi lui répondre. Mal. C'était évident, même si au dessous de la réalité, mais... c'était aussi le genre de réponse qu'on n'aimait pas entendre, aussi visible que ça l'était. Bien ? En plus d'être un mensonge éhonté, s'était presque une cruel, vu la décision que j'avais pris nous concernant. Alors une réponse s'était imposée, pas forcément la plus précise, pas non plus positive, mais... honnête à sa façon.

« Je fais aller, autant que je peux. » Je n'avais pas tenté de forcer un sourire, elle valait mieux que ça et j'étais bien trop fatigué par tout ça pour essayer de la rassurer inutilement.

« Et toi ? Est-ce que tu vas bien ? »

Ma question était stupide vu la colère qu'elle avait laissé échappé un instant plus tôt. Mais je m'inquiétait pour elle, quel que soit mon état, quel que soit notre relation. Ça n'avait jamais changé en plus de 150 ans et ça n'allais pas changer maintenant.

« Je... » De la frustration s'était mêlée au bouillonnement de sentiments qui m'assaillait, et bien vite elle muait en colère. Dirigée à mon encontre. Je ne savais plus lui parler en évitant les sujets douloureux, faisant ainsi, j'avais l'impression de tirer un trait sur tout ce que nous avions vécu, et malgré mes regrets... je refusait d'en arriver là.

« Et si on arrêtait ça ? Je n'en peu plus de ces banalités et de tout faire pour éviter les questions difficiles.Soyons honnêtes, réellement. Je vais mal. Pire que ça, même. Mais... je m'inquiète pour toi. Je veux être sûr que toi, ça va ? »

Ils y étaient encore, à éviter l’essentiel. En même temps, comme pouvaient-ils trouver la force d’être honnêtes? Comment pouvait-on agir normalement après tout ce qui s’était passé? Au point où ils en étaient, une douleur n’en valait pas-t-elle une autre?

« Non, mais ça va aller. Je ne suis pas revenue que pour le travail. » répondit la blonde alors qu’elle laissait planner le sous-entendu l’espace d’un instant. La démone aurait voulu être franche avec lui, lui qui avait tant perdu pour elle. Et à chaque fois, le destin avait une drôle de façon de tourner le couteau dans la plaie.

« J’en suis désolée. » fit-elle simplement. Que pouvait-elle ajouter? Comment pouvait-elle être non seulement en mesure de lui apporter encore un quelconque bonheur? La blonde avait l’impression que cette faculté lui avait été retiré au moment où elle était partie, encore. Katie avait pensé que cela lui apporterait une certaine quiétude au milieu du chaos régnant au sein de son être, mais apparemment, elle s’était trompée.

« Probablement autant que toi. » fit-elle tout en relevant l’ironie de sa remarque, un sourire triste au coin des lèvres. « Bien » n’était pas le mot, sauf s’il avait une définition qu’elle ne connaissait pas. Horrible, détruite, peinée, non, apparemment « bien » n’était pas le bon descriptif, mais ça, elle ne pouvait le lui avouer, pas après tout ce qui s’était passé, pas après tout ce qu’il avait dû subir.

Soudainement, la blonde remarqua que quelque chose n’allait pas et rapidement, Connor avait enchaîné avec colère, quémandant de mettre fin à ce théâtre qu’était devenu leur relation.

« Oh… Connor… Je suis tellement désolée. » souffla la démone alors que le déchu lui avouait enfin à haute voix cette douleur qui le submergeait. Il était clair qu’il n’allait pas bien, mais de l’entendre prononcer ces mots, sans se dissimuler derrière leurs banalités habituelles, lui avait fait l’effet d’un coup de poignard. Et elle savait qu’elle ne trouverait pas les bons mots pour alléger sa souffrance, mais la démone ne pouvait qu’être honnête. Après tout, comment pouvait-elle encore se cacher alors qu’il venait de briser cette façade ridicule? « Je… Je ne sais pas Connor. Je ne sais pas comment on est censé survivre à ça. Je m’inquiète constamment pour toi et je m’en veux pour tout ce qui est arrivé. Je me demande si je n’aurais pas dû rester, être là pour toi, mais te voir comme ça… C’était insupportable. » déglutit la blonde alors que son ton devenait saccadé, difficile. Elle aurait voulu lui avouer tant de choses, mais la douleur lui semblait soudainement intolérable. La démone s’en voulait de n’avoir pu trouver la force de rester, de l’épauler alors qu’il avait été là pendant tout ce temps pour elle, et ce, même s’il restait une chance qu'elle ne puisse jamais se réveiller. Comment pouvait-elle lui dire ainsi qu’elle souffrait alors qu’il était aussi à son plus mal? Comment pouvait-il encore s’inquiéter pour elle? Katie se passa une main dans les cheveux, agitée, promenant son regard entre l’horizon et le déchu. « Comment peux-tu t’en faire pour moi? Enfin, Connor, regarde-toi! Tu… » La démone s’arrêta soudainement, ne pouvant prononcer la suite, espérant qu’il ne devine pas ces mots qui auraient sonnés encore plus douloureux lorsque énoncer avec sa propre voix.

Je lui avait dit que j'étais désolé pour son travail, elle avait répondu brièvement, tout était en politesse et restait en surface et je n'aimais pas ça. Il paraissait évident qu'on étaient amenés à se croisés, nos rencontres se multipliaient qu'on le veuille ou non.

« Tu n'as pas a... » Je n'avais jamais fini ma phrase, car tout ça restait encore superficiel et me faisait me sentir encore plus mal que je ne me sentait déjà.

Je n'étais pas du genre à mentir de but en blanc, et ça n'était même pas ce que je faisais avec elle. C'était... plus compliqué et plus frustrant que ça. Parce que je savais pertinemment que l'un comme l'autre savions qu'il y avait autre chose sous la surface. Nous jouions la comédie quand il paraissait évident que ça n'était pas nécessaire. Pourquoi ? Par convenance ? Est-ce que c'était vraiment si important de sauvegarder les apparences ou le « paraitre » ? Ce qui importait, c'était la vérité et de savoir comment elle se sentait vraiment. Alors à quoi bon ? J'avais finalement craqué et demandé à ce qu'on cesse cette charade, avouant ce qu'elle savait de toute façon déjà.

« Oh… Connor… Je suis tellement désolée. »

« Je n'ai pas dit ça pour... C'est mon problème, ma faute... » Fis-je, souhaitant clarifier qu'elle n'avait rien à se reprocher dans cette histoire. Mon état, mes douleurs... tout était compliqué, oui. Mais je ne voulais pas qu'elle s'en sente responsable d'une quelconque manière.

« Ou si on est censé survivre... » Soufflais-je amèrement, baissant le regard sur le sable à nos pieds. J'avais ensuite relevé le regard, prenant sur moi pour ajouter des mots que j'aurais voulu avoir eu le courage de lui dire plus tôt. Mais ils étaient durs et je savais qu'ils la blesseraient, aussi... je les avaient tuent trop longtemps.

« Tu n'aurais rien pu faire. Le fait que tu soit partie n'a rien changé. Je ne suis pas... tu ne peux rien faire pour moi. Je dois trouver une façon de m'en sortir seul. » Si jamais une telle porte de sortie existait il m'appartenait de la trouver, mais... je devais bien avouer que je n'étais pas certain de vouloir chercher.

« Je suis navré... ce n'est probablement pas ce que tu veux entendre mais... c'est la vérité. Alors ne te sent pas coupable d'être partie... tu as eu raison. »

Les mots étaient sortis, mais ils n'avaient pas été faciles à prononcer. Pourtant, c'était fait et même si elle n'appréciait pas entendre ces derniers, j'osais espérer que ça atténuerait au moins sa culpabilité.

« Comment... » Elle semblait ne pas comprendre comment je pouvais m'inquiéter pour elle, alors que je n'était que l'ombre de moi-même ou quelque chose comme ça. Je n'étais pas certain de pouvoir terminé la phrase qu'elle avait arrêté en cours de route, mais... j'étais au moins certain que la fin n'était pas glorieuse.

« Katie... je ne pourrais jamais cesser de vouloir de protéger, de vouloir ton bonheur. Même si je suis... même si tu le trouves sans moi... »

Il était là, devant elle, et tout qu’elle arrivait à penser était à quel point la blonde avait envie de le serrer contre elle, de lui dire que tout irait bien, mais ça aurait été un mensonge. Rien ne serait plus comme avant, et cette pensée faisait naître une profonde tristesse. Il avait précisé que ce n’était pas de sa faute, qu’elle n’avait pas eue de part à jouer dans son malheur, mais Katie ne pouvait s’empêcher d’y croire. Et puis, même si elle n’en avait pas joué, il restait qu’elle n’avait pas été à la hauteur, et ce, même s’il avait tout fait pour la chasser. La démone n’avait pas osé répondre à sa répartie, mais son cœur se serra un peu plus alors qu’il fuyait à nouveau son regard, trouvant un quelconque réconfort dans le sable de plage. Comment elle aurait donné pour être à sa place.

« Je ne comprends pas ton obstination à vouloir absolument être seul... parce que ça ne me donne pas l’impression que ça fonctionne » fit-elle alors qu’elle n’arrivait pas à camoufler cette colère au fond de son être. Inconsciemment, la blonde lui en voulait de s’être enfoncé lentement dans cette triste version de lui-même. Comment était-il tombé sur bas? Alors qu’elle avait pensé pendant si longtemps que leur amour était suffisant, que leur union serait immuable, qu’il traversait le temps. Et cette vision de lui ne faisait que lui rappeler cette réalité.

Katie déglutie péniblement, espérant que quelqu’un vienne l’achever avant qu’ils ne soient dit tant de choses impardonnables. Où était ces fichus démons quand on avait besoin d’eux? La démone savait qu’elle aurait rapidement du mal à étouffer le dégluti de mots. Celui qu’on regrette tout de suite après l’avoir dit, celui qui nous motive à retourner en arrière pour vouloir nous arrêter nous-même. Celui-là.

Il avait dit qu’elle avait eu raison de s’enfuir, aussi loin qu’elle le pouvait, mais apparemment l’Europe n’avait pas été suffisant pour étouffer sa peine. Katie n’avait cessé de penser à lui, à quel point cette situation était surréaliste, impensable.

« Non » fit la blonde alors qu’elle levait une main devant lui en signe de protestation. Comment pouvait-il dire ça, alors qu’il proclamait vouloir son bonheur l’instant d’avant? Comment pouvait-il envisager qu’elle veule passer le restant de sa vie avec quelqu’un d’autre? Bordel, ça n’avait été que lui, uniquement lui, jusqu’à maintenant, et à jamais. Il pouvait bien dire ce qu’il voulait, il n’allait pas gagner sur ce point. La démone était prête à faire des concessions, même si ça impliquait qu’il la remplace par quelqu’un d’autre, tant que ça n’était pas Alice, si ça pouvait le rendre heureux, mais ça c’était impossible.

« Il est hors de question que ça arrive, parce que je tournerais jamais le dos à ce que je ressens pour toi Connor. » répondit-elle avec autant de véhémence que si on venait de lui proposer un mariage avec Sytry lui-même. « Tu peux continuer à t’obstiner, j’en ai rien à faire! Figure-toi que je peux être aussi borné que toi! »

J'avais pensé un instant avoir été trop dur dans mes mots, même s'ils n'avaient jamais été là pour la blesser, mais elle semblait plus inquiète pour moi qu'affectée par ce que j'avais dit. Si ça aurait du me rassurer, ça ne le faisait pas. Parce que je ne voulais pas qu'elle s'inquiète comme ça pour moi, pas quand elle ne pouvait pas m'aider. C'était, selon moi, tout sauf juste. J'avais prit la décision de mettre un terme à notre relation car je n'était pas capable de lui offrir ce dont elle avait besoin. Mais également parce que je n'était pas en état d'être en couple, parce que j'avais besoin d'aller mieux avant toute autre chose. J'avais choisi, sans lui laisser le droit de vote. Alors la voir s'en faire encore pour moi, de la sorte... C'était bien trop difficile à entendre.

« Katie... » Je la regardais le regard triste et inspirait, soufflant la réponse qui si elle ne voulait pas l'entendre, était la seule que je pouvais donner. « C'est pas censé être un remède miracle. Je... Je suis juste... J'ai besoin de me concentrer sur le fait d'aller mieux. C'est difficile, et ça prend du temps. Mais c'était le bon choix. Ça l'est toujours. Je ne suis pas en mesure d'être plus à l'heure actuel que... ça... » Les mots manquaient pour décrire ce que « ça » était. Car je n'était plus sur de rien. Plus un ange, pas un homme... J'étais un déchu, pour certains, mais c'était un mot seulement. Ce que je ressentait, ce que j'étais... j'avais perdu toute notion. Je m'étais perdu, au milieu de ces épreuves, de ces sentiments qui m'assaillaient. Et quoi qu'elle pense, quoi qu'elle veuille... j'étais toujours perdu et loin d'être celui qu'elle avait connu ou qu'elle avait aimé.

C'était pour ça que j'avais avoué vouloir la voir heureuse. Pour ça que j'avais suggéré, avec douleur, que je lui souhaitait d'avancer. Mais... sa réponse avait été catégorique. Et je l'avais regardée, surpris et affecté à la fois. Après tout ce temps, ces rencontres et ces faux semblants... j'avais eu espoir qu'elle ai avancé, mais il n'en était rien. Et je réalisait quelle semblait... m'attendre ?

« Je... » J'ignorais quoi répondre. Ses paroles étaient empreintes d'une détermination qui lui ressemblait, certes. Mais que je n'avais pas vu traverser ses traits depuis bien longtemps. Elle était en colère et frustrée, vraisemblablement.

« Je ne peux pas te demander de m'attendre, Katie. Ce n'est pas juste. Ce n'est pas... j'ignore si j'irais mieux un jour. J'ignore si... Je refuse que tu foute en l'air ton existence à cause de moi. Tu... Tu mérites mieux que ça... » Elle avait sacrifié sa vie humaine pour devenir ce qu'elle était aujourd'hui. Pour gagner sa liberté. Et j'avais l'impression qu'elle mettait tout ça de coté, pour moi. Je m'approchais d'elle, tendant une main vers sa joue pour appuyer les mots suivants :

« Tu voulais être libre. Ne laisses jamais personne, surtout pas moi t'empêcher de vivre ta vie... »

La démone l’avait regardé prononcer ces mots avec une profonde tristesse. Elle ne savait trouver une réponse qui puisse lui être d’un quelconque réconfort et c’est pour cette raison qu’elle choisit le silence. Elle savait qu’il n’existait pas de miracle, même si elle se surprenait presque à vouloir prier pour ça arrive. Un démon qui prit, et puis quoi encore? Une chose était certaine, c’était que pour lui, elle aurait tout fait.

La blonde s’en voulu immédiatement pour s’être laisser emporter par cette colère, qui s’était emparée d’elle subitement. Elle n’avait pas l’intention de lui cracher son ressentiment à la figure, alors qu’il était à son plus mal, mais Katie n’avait pu rien faire pour retenir le dégluti de mots. De l’entendre de vive voix lui fit l’effet d’une douche froide et elle ne ressentait maintenant plus qu’une profonde tristesse pour lui. Phénomène qui ne fit qu’être exacerbé par la réponse de celui qu’elle aimait. Manifestement, sa palette d’émotions était plutôt réduite dans le cas présent. C’était vraiment une situation de merde.

« Je sais tout ça Connor, mais… » La blonde s’était tu l’espace d’un instant. Emplissant le silence d’un profond soupire. Elle ne trouverait jamais les bons mots, elle le savait. La démone ne cherchait pas à l’attrister encore plus et elle avait l’impression que c’était tout ce qu’elle pouvait faire depuis un bon moment. À chaque fois, ça lui faisait l’effet d’un coup de poignard de le voir dans cet état et pourtant, il lui semblait ne jamais être en mesure d’échapper ces moments.

« Très bien » avait-t-elle fait simplement alors qu’elle se reculait d’un pas, évitant la main du déchu. Elle aurait tout donner pour qu’il la touche encore une dernière fois, mais pas comme ça. Pas dans ces circonstances. Ça lui donnerait le coup de grâce. La blonde savait qu’il ne l’écouterait pas et elle ne pouvait pas lui en vouloir à en constater son triste état. Tout ce qu’elle lui souhaitait pour le moment, c’était qu’il aille mieux et elle doutait que se laisser emporter à nouveau dans la colère allait lui être d’une quelconque utilité. Et puis, bien qu’elle ne voulait pas l’admettre, elle savait au fond d’elle-même qu’elle ne pouvait rien y faire. Tout ce que la blonde pouvait faire pour l’instant, c’était de lui laisser croire ce qu’il voulait. Si ça pouvait lui être d’un quelconque réconfort, elle pouvait encore le supporter. Ils n’étaient plus à ça de près.

Je n'étais pas certain que Katie ai réellement accepté mon discours, ou changé de projets. Pourtant, je ne pouvais pas faire plus que ce que je venais de faire. Quoi que je pense, quoi que je dise, la décision était la sienne. Je ne pouvais pas changer ça et ne le voulais de toute manière pas. J'avais dit quel était mon sentiment sur la question. Lui retiré son choix... ça n'était pas moi. Peut importe l'état dans lequel j'étais.

Elle était restée sobre, blessée peut-être par mes paroles. Limitant les siennes. Et je n'avais pas renchérit. Pas parce que je ne m'en voulait pas de la faire possiblement souffrir. Mais parce que tout ce que je pourrais ajouter ne ferait qu'empirer la chose. Je le savais.
Quand elle avait dit un simple « Très bien », reculant pour éviter le contact que j'avais initié, j'avais fait de même, reculant. Réalisant à quel point elle avait eu raison de le faire. Même si ça n'était pas sans douleurs de la voir refuser cette attention, l'accepter aurait probablement été plus difficile encore.

La meilleure chose à faire à présent, c'était de couper court. Nous avions été honnête et arrêté avec les politesses qu'on s'accordait depuis trop longtemps. C'était déjà énorme. Rien ne servait de faire durer le supplice.

« Je dois finir mon shoot. » Lançais-je finalement en désignant mon appareil du regard, le levant du regard. Je l'avais sitôt récupéré en main et avait ajouté :

« Prend soin de toi. » Avant de m'éloigner pour retrouver la foule pour prendre les clichés qu'on attendait de moi.

J'avais l'impression d'avoir été poignardé avec toutes les armes surnaturelles qui puissent exister, pour tenter de trouver celle qui finirais le travail. Le coté positif, c'était que je pouvait le cacher derrière mon appareil. Prenant et prenant des photos, en essayant d'oublier la discussion que nous venions d'avoir...