C'était la troisième fois qu'Evelyne et moi nous retrouvions, tard, dans mon bureau. Le travail sur la fondation avançait, c'était certain, mais nous n'avions pas pu nous rencontrer plus, sans empiéter sur nos autres obligations. Cela dit, les choses avançaient plus vite à deux qu'a elle seule et au moins, l'avocate ne se tuais plus à la tâche. Plus autant qu'avant, en tout cas.

J'avais pour habitude de bien traiter mes employés, bon salaires, conditions de travail agréables... tout était réuni pour qu'ils se sentent bien parmi nous. Et pour maintenir les apparences. Alors je n'avais pas pu laisser Evelyne se rendre malade pour l'association, même si c'était de son propre chef. Ça ne ressemblait pas à la réputation de la boîte, ni à la mienne. Et ça avait le mérite de me faire passer plus de temps avec elle. La trêve avait beau être terminée, m'autorisant de nouveau à de nombreuses autres distractions, je trouvais toujours de l'intérêt à mes rencontres avec Evelyne.

« Avec ça, toute la procédure d'agrément sera terminée. Il suffira qu'ils traitent le dossier. » Ce qui donnerait son statut à la fondation. Le plus gros serait donc passé et toutes les tâches ensuite seraient plus petites, même si elles resteraient essentielles.

« On a encore bien bossé. Il reste pas mal à faire, mais on forme une bonne équipe. Le dossier me parait parfait comme ça, qu'est-ce que tu en penses ? » Lui demandais-je après une relecture à ses côtés.

Je regardait l'heure et soufflais finalement :

« Wow, il est plus de vingt-deux heures. Le temps est passé à une vitesse. » Les bureaux étaient vides depuis longtemps, à peu près depuis l'heure ou elle m'avait rejoins dans le bureau.

« Qu'est-ce que tu en penses si on arrête pour ce soir ? On s'organisera rapidement une autre date. Entre temps je te laisse déposer le dossier. » Je n'étais pas foncièrement pressé de partir, mais elle, elle restait humaine et elle avait un job en plus de celui-ci. J'avais conscience qu'il lui fallait du repos et je n'avais pas proposé de l'aider pour qu'elle finisse quand même épuisée et sans sommeil.

Alors je proposait d'en finir, ne la forçant pas non plus. Mais doutant qu'elle refuse vu la manière dont j'avais présenté les choses. D'autant plus qu'étant techniquement son patron, elle avait du mal à dire non dans ce genre de circonstances. Un bon moyen d'user de ses travers humains pour la forcer au repos. Il ne me resterait plus qu'a la raccompagner à sa voiture et j'aurais d'autres choses pour m'occuper ce soir.

Comme je l'avais prévu, Evelyne avait validé mes mots, acceptant qu'on arrête là pour ce soir et confirmant que le dossier était prêt. Elle avait ensuite confirmé qu'elle irait le déposer et j'avais validé d'un signe de tête et d'un sourire, tandis qu'elle ajoutait encore quelques paroles. Pour me remercier.

« C'est normal, ce n'est pas la peine de me remercier tu sais. Cette fondation... c'est un projet qui me tiens à cœur. Et si ça t'évite de t'épuiser à la tâche, c'est encore mieux ! » Fis-je avec humour, alors qu'elle me tendais ma veste.

« Merci. » J'enfilais cette dernière et reportais ensuite mon attention sur l'humaine, alors qu'elle m'interrogeais sur mes plans du week-end.

« Rien de précis, Cameron à son dimanche. Alors on va se voir, mais nous n'avons rien prévu en particulier. Et toi ? Des choses intéressantes de prévu ? Tu comptes aller boxer ? » Presque machinalement, j'avais continué à parler tout en avançant jusqu'au système électronique pour appuyer et éteindre ce qu'il restait d'allumer. Mais aussi baisser les stores du bureau. Puis, j'avais continué ma route, conduisant Evelyne jusqu'à l'ascenseur publique qui se trouvait a quelques centaines de mettre de nous.

« Je te raccompagne à ta voiture. Vu l'heure, je préfère. » La mienne était dans la parking sous-terrain réservé au personnel ou à nos clients. Mais vu notre heure de rendez-vous, elle n'avait pas pu se voir ouvrir l'accès.

« J'ai demandé à mon assistante de te faire faire une carte magnétique. Tu devrais l'avoir pour la prochaine fois. Le parking sous-terrain est plus pratique et sécurisé. » La machine qui magnétise nos cartes avaient du être renvoyé en réparation et il y avait eu un léger délai. C'était cela dit une raison supplémentaire de me montrer gentil et serviable avec elle, alors je ne m'en plaignait pas.

Une fois le long couloir traversé, j'avais grimpé dans l'ascenseur avec Evelyne a ma suite et appuyé sur le bouton amenant au lobby alors que les portes se refermaient sur nous.

Il était tard et j'aurais presque pu mettre son manque de discussion sur ça et la fatigue. Si seulement elle n'avait pas été bien plus loquace, quelques minutes avant, quand il s'agissait du travail. Dès que nous avions clôturer le dossier fondation pour ce soir, graduellement, ses paroles s'étaient faites plus limitées. Jusqu'à ce que l'on rejoigne l'ascenseur et qu'elle devienne complètement silencieuse. J'avais su qu'elle avait un championnat de boxe ce week-end, puis... plus rien ou tout comme. Juste une politesse car j'avais dit vouloir la raccompagner. Elle avait à peine réagit à propos de la carte magnétique, pas un mot. Elle avait peut-être eu une légère réaction, mais je n'était même pas certain que c'était pour cela.

Malgré ce silence, je n'avais rien dit dans l'immédiat, car je m'intéressait au pourquoi et tentais de déchiffrer son attitude. Dans l'ascenseur elle s'était immédiatement adossée à la parois du fond et semblait dans ses pensées. J'aurais pu les pénétrer et savoir simplement ce qu'il en était, mais je préférais le faire avec nos soldats et autres recrues. Pour juger de leur loyauté. Dans ce genre de configurations... je préférait faire avec mes autres atouts. Car malgré mon manque d'humanité, j'étais devenu doué, en plus de quatre mille ans, pour les comprendre et déchiffrer leurs attitudes.

De deux choses l'une, soit elle était juste fatiguée et avait fait un effort pour la partie travail et converser, soit la discussion avait prit une tournure qui avait causé ce froid. Après tout, elle était celle qui avait commencé à lancer la discussion en me demandant ce que j'avais prévu ce week-end. A ce moment là, elle semblait toute disposée à parler. Même si elle s'y serait forcé.

J'avais attendu pour intervenir, que l'on sorte de l’ascenseur. Peu friand de la faire se sentir piégée par ma question, alors que nous étions dans un espace clos d'où elle ne pouvait pas s'échapper.

« Tu es seulement fatiguée ou j'ai dit quelque chose de mal ? C'était le trajet d'ascenseur le plus long que j'ai jamais prit ! » J'avais terminé avec un sourire et un trait d'humour certain. Préférant la jouer sur ce ton, que trop sérieux. L'idée n'était pas de la froisser, mais seulement de comprendre ce qui se passait dans sa jolie petite tête. Sans tricher et regarder par moi même. Même si elle répondait quelque chose de faux, j'aurais une petite idée de ce qui la chagrinait avec la manière dont elle le dirait. Cela dit, pour ne pas laisser paraître que sa réponse avait autant d'importance, j'avais décidé d'ajouter :

« J'espère que ton championnat se passera bien, sinon. Un jour, je crois que j'aimerais venir te voir concourir. Ne serait-ce que pour te voir faire à ton niveau, plus que te forcer à m'entraîner. Si tu es d'accord avec ça, bien sûr ! C'est samedi, ou dimanche ce week-end ? » J'aurais pu parler de son championnat plus tôt, dans l'ascenseur. Et rompre le silence. Mais elle l'avait elle même instauré. Alors j'avais patienté. Cela dit, à présent, j'avais décidé de rattraper un peu mon retard, d'autant plus que ces questions que je posait, en plus de celles sur son silences, m'apporteraient beaucoup d'informations avec ses réponses. Car j'avais quelques soupçons concernant l'ascenseur. Des soupçons que j'attendais de confirmer avec ses paroles.

Nous avancions doucement, je n'étais pas pressé de conclure cette conversation, qui le serait dès que nous rejoindrions sa voiture et je voulais la ménager également. Nous avions parlé cette soirée, oui. Mais presque exclusivement de la fondation, un sujet important, mais pas celui qui m'intéressait le plus.

« Tu n'as pas mal aux chevilles ou aux pieds ? Après toute une journée... je ne sais pas comment vous faites pour porter des talons. »

Une excuse comme une autre pour garder un pas lent. Et puis, en soit, je ne voulais réellement pas qu'elle se blesse. Il n'y avait donc aucun mensonge, encore une fois. Seulement... une utilisation à bon escient de mes pensées.

Ma question, même sur le ton de l'humour, avait eu une réponse. Une en laquelle je ne croyais pas vraiment. Car elle avait l'air étrange et son sourire semblait presque là pour me convaincre. J'aurais pu vérifier mes soupçons très vite, dans ses pensées, mais je n'en faisait rien. Peut importait si elle mentait, au final, car ça n'était pas à cause de quelque chose que j'avais dit. Ou plutôt... si ça l'étais, j'avais une petite idée de quoi. Je décidais donc d'accepter sa réponse sans sourciller et soufflais seulement :

« Essaie de te sortir ces dossiers de la tête. Tu as besoin de souffler. » Je lui offrais un sourire bienveillant et oubliais ce sujet, ou du moins gardant dans un coin de mon esprit cette impression que j'avais à ce propos.

« Je ne m'attends pas à un combat pro. Ne t'en fait pas. Seulement... je doute que ce sera aussi bancale qu'avec moi dans tes pattes. » Dis-je avec humour.

« Quant à te porter chance... j'ignore si ce sera le cas. Mais... j’imagine qu'on verra. Seulement pas ce dimanche, parce que je doute que ce soit au goût de Cameron. Mais... le prochain pourquoi pas. » Si ça avait été samedi, j'aurais pu sauter sur l'occasion. Dommage. Car même si rien ne se passait entre Evelyne et moi, je savais pertinemment qu'emmener Cameron à cet évènement était une mauvaise idée. La dernière chose que je voulais, c'était qu'elle se montrer désagréable avec Evelyne. Ce qui aurait très certainement été le cas, car elle pouvait être jalouse pour très peu, voir rien... J'en savais quelque chose.

Ma réflexion sur ses talons avait été chronométrée à la perfection semblait-il. Parce qu'après m'avoir dit que c'était l'expérience qui aidait, mais qu'elle avait hâte de les retirer... l'un d'eux s'était brisé. Contre toute attente, je n'y était pour rien et c'était un coup du destin. Toujours est-il qu'elle s'était retenue de tomber en s’agrippant à mon bras et que j'avais laissé faire, me tournant pour m'assurer qu'elle allait bien, mais aussi aviser sa réaction et son expression.

« On dirait bien ! Est-ce que ça va ? Tu ne t'ai pas fait ma à la cheville ou... ? » Demandais-je alors qu'elle me présentait son talon en main. Je décidais de lui proposer de la raccompagner pour de bon et de conduire, car si elle s'était fait mal, les pédales de voiture n'étaient pas l'idéal avec une cheville blessée.

« Je peux te conduire si tu as... » Je n'avais pas eu le temps de finir ma phrase, car j'avais sentit des présences à coté, très vite confirmées par des grognements, puis le visuel. Pas moins de six chiens de l'Enfer se trouvait devant nous, près à l'attaque.

« Tu crois pouvoir courir ? » Fis-je discrètement à Evelyne, sans détourner mon regard des chiens. Elle ne comprendrait probablement pas. Contrairement à moi, elle ne pouvait pas les voir. Et s'il me faudrait m'expliquer et trouver de quoi détourner les choses... il fallait en premier lieu qu'on échappe à ces créatures, sans que je ne puisse les détruire ou montrer ma véritable force ou nature. Avant d'avoir sa réponse, je m'étais cela dit décalé, me mettant entre les chiens et l'humaine qu'elle était. Si je ne pouvais pas révéler ce que j'étais, je pouvais au moins utiliser de ma télékinésie. Quitte à l'effrayer avec un pouvoir... c'était le plus facile à expliquer.

« Je suis désolé... Je sais que ça va paraître dingue et que... » Un chien avait chargé, les autres se contentant de bouger doucement dans le but de nous encercler, ça paraissait évident. J'avais alors coupé mes paroles et utilisé ma télékinésie pour repousser le chien avant qu'il ne nous atteignent, puis les autres pour nous faire un passage avant qu'ils ne nous encerclent pleinement.

J'avais alors saisi Evelyne par la main, pour la guider à ma suite, alors que je commençais à courir.

« C'est dangereux... C'est... compliqué à expliqué... » Fis-je entre deux foulées, alors que je restait sur le qui-vive et surveillait les chiens à présent à nos trousses. Nous ne pourrions pas les distancer de la sorte. Pas alors qu'ils étaient à quatre pattes. Même avec le temps que je nous avait fait gagner en les envoyant valser. Le meilleur moyen d'agir, sans en révéler trop sur ma nature était de continuer avec la télékinésie, jusqu'à pouvoir fuir pleinement ou... nous cacher quelque part.

Finalement, on aurait dit que le destin avait fait qu'elle se casse son talon, non pas pour m'aider, mais pour qu'elle soit en mesure de courir. C'était une excellente chose qu'elle ai retiré ses chaussures, parce que les chiens de l'Enfer n'auraient pas attendu patiemment qu'elle le fasse et son petit couteau n'allait pas faire grand chose. Seul le surnaturel pouvait détruire ces choses. Je le savais pertinemment et je n'était pas le seul. Tous les camps devaient le savoir, vu les rapports que j'avais reçu et les chiens tués.

Ça ne me valait pas d'être 'humain', j'aurais pu les distancer si facilement en temps normal. Cela dit, j'aurais aussi pu les détruire en un claquement de doigt. Tous les six, d'un coup. Même affectés par les résidus de fragmentation des cavaliers, ils restaient des âmes infernales. J'avais le pouvoir de les détruire complètement, mais... ça n'était pas dans mes plans. Pas parce que je voulais garder Evelyne en danger, car c'était tout l'inverse. Mais parce que les ordres étaient clairs, il ne fallait pas les détruire. J'avais même été celui qui avait relayé cet ordre de Lucifer à nos armées. Ça n'était pas pour aller contre au premier signe de complication.

Notre course ne suffisait pas, je le savait, mais j'en avait la preuve à chaque foulée. Car les grognements se rapprochaient et se rapprochaient sans cesse. Jusqu'à ce que je ne vois l'un d'eux déchirer la veste d'Evelyne en essayant de refermer ses mâchoires sur elle. Si nous ne faisions que courir, bientôt c'était sur ses chairs que leurs mâchoires se refermeraient. J'avais alors réfléchi rapidement, puis m'étais arrêté net, tirant Evelyne derrière moi avec la main que j'avais toujours dans la sienne. Les chiens ne s'étaient pas arrêtés, pas même la surprise pouvait les calmer semblait-il. Mais j'avais sitôt lâché la main d'Evelyne et activé mes mains, mimant un effort conséquent de télékinésie alors que j'aurais pu faire de même d'un simple regard. Même si elle ne les voyaient pas, elle avait surement vu une poubelle glisser sous le choc avec un des chiens. Ou quelques impacts sur des murs et autres panneaux publicitaires et compagnie. Sans attendre, j'avais repris la main de la brune et recommencer à courir.

« Ça ne vas pas les retarder longtemps, il faut qu'on se cache. Ils abandonneront s'ils ne nous trouvent pas... » Courir et courir encore n'était pas une option. On ne battais pas une créature à quatre pattes en se tenant sur deux jambes.

Je vérifiais portes et recoins pour nous cacher tous les deux, rapidement. Presque frénétique. Car si cette frappe télékinétique les avaient secoués le temps qu'ils doivent se remettre d’aplomb... Je doutais que l'on ai plus de quelques secondes avant qu'ils ne reprennent leur chasse et ne nous voient nous cacher.

La porte suivante était celle d'un bâtiment probablement inoccupé vu la tête du métal et du reste. Aussi, j'avais tourné le verrou depuis l'intérieur par télékinésie et nous avaient fait entrer avant de refermer la porte et le verrou derrière nous. Le verrou n'était pas utile réellement, quoi que... tant qu'ils étaient en train d'attaquer, ils auraient un corps, une substance. Et ne pourraient pas rentrer aussi facilement. Ce qu'il fallait surtout, c'était qu'on fasse silence. Le temps qu'ils nous dépassent et... même au delà. Nous devrions probablement attendre quelques minutes dans cet espace réduit, mais... c'était mieux que rien. Je regardais autour de nous, difficilement. On y voyait pas grand chose, le bâtiment était plongé dans l'obscurité et inhabité comme je le pensait. Nous n'avions qu'un tout petit espace disponible, après quoi, il y avait des échafaudages et autres trucs de chantiers nous bloquant le passage. Les retirer n'était pas une option, parce que je n'étais pas certain que le bâtiment soit le plus stable qui soit, vu certaines poutres en fer que je voyais plus loin pour maintenir le plafond.

« Restons cachés. Jusqu'à ce qu'ils nous dépassent et qu'on ne les entendent plus... » Chuchotais-je, à son oreille, le plus discrètement possible. Alors que les grognements et bruits de course des chiens se rapprochaient. Ils s'étaient remit de mon attaque et ils n'étaient pas contents. J'avais posé une main sur les lèvres d'Evelyne, en entendant un grognement extrêmement proche de nous. Je ne pouvais pas risquer qu'elle gémisse de peur ou autre. J'avais essayé de faire passer un désolé, de mon regard au sien. Puis, j'étais resté silencieux, écoutant avec attention les nombreux bruits que faisait l'animal juste derrière la porte. Il ne semblait pas gratter, ou savoir que nous étions là. Pas encore. Mais il ne partait pas. Ils nous cherchaient...

Acculés dans cette cachette, nous ne pouvions pas faire grand chose d'autre si ce n'était attendre. Il n'était pas question d'affronter les chiens ou de les détruire, alors c'était notre meilleure option. Toutes les autres, du moins celles n'impliquant pas que je mette en danger ma couverture, étaient bien trop risquées pour Evelyne. Toute humaine qu'elle était, la laisser mourir ne faisait pas partit de mes plans. Au contraire, j'étais en train de la protéger de ces bêtes enragées.

Perdu dans mes pensées, tandis que l'un des khawarij était juste derrière la porte, j'avais senti quelque chose caresser les doigts avec lesquels je couvrais sa bouche. Une larme. Elle était terrorisée. Si normalement j'aimais voir des humains dans cet état et était même celui qui s'amusait à provoquer la chose... Cette fois, je ne prenais aucun plaisir à son état. Car s'il la faisait paniquer... Les chiens attaqueraient aussitôt. Il me fallait la calmer, sans parler et la faire tenir jusqu'à ce que les bêtes s'éloignent. Après ça, même si nous ne pourrions probablement pas sortir de suite, elle pourrait au moins expirer et évacuer un peu de la terreur qu'elle semblait garder à l'intérieur. J'avais alors essuyé sa larme de ma main libre, doucement, non seulement pour ne pas la brusquer mais pour éviter les bruits. Puis, j'avais articulé sans un son « Ça va aller. ».

J'étais du genre patient et déterminé comme chasseur, mais ces créatures n'avaient pas la réflexion ou l'intelligence d'un démon. Elles étaient au contraire ce qui arrivait à une âme si elles n'étaient pas à la hauteur pour en devenir un. S'ajoutais à cela l'influence des cavaliers qui en faisait presque des animaux enragés ne comprenant que la mort... J'avais bon espoir qu'ils se lassent et aillent chasser plus loin, ou ils trouveraient d'autres personnes à attaquer.

Soudain, des bruits différents s'étaient joints aux grognements. Comme quelque chose qu'on lacère et met en miettes. Des plaques de bois posées juste avant la porte me revenaient en mémoire, je les avaient avisées pour la cachette avant d'opter pour celle là. Ils devaient vérifier qu'on étaient pas sous cette pile. A en croire les bruits, ils allaient finir de vérifier assez vite. J'imaginais facilement l'état dans lequel ils avaient laissé le bois et me rapprochait d'Evelyne, retirant ma main de ses lèvres pour l'enlacer et l'a ramener contre moi. Si elle avait eu peur en les entendants... je ne voulais pas risquer d'attendre sa réaction en entendant ce boucan juste à coté de nous.

Profitant du bruit extérieur et de notre nouvelle proximité, j'avais susurré :

« Ils vont partir... Ne t'en fais pas... » Des sons gutturaux et enragés s'étaient élevé juste après mes mots, mais je savais qu'ils ne m'avaient pas entendus, car j'avais parlé si bas que je n'étais pas sur qu'Evelyne elle même, ai compris ce que je disais. Non, c'était de la colère semblait-il. Ils ignoraient ou nous étions et avaient envie de tuer. Je pouvais comprendre ce sentiment, ils n'avaient cela dit pas choisi les bonnes victimes.

Soudain, j'avais pu percevoir le bruits de plusieurs foulées de créatures, trois, peut-être quatre. Les autres étaient plus loin et si je me fiais à leurs grognements qui devenaient plus faibles, ils s'éloignaient pour les rejoindre. J'attendis un instant et quand les grognements s'étaient évanouis, j'avais soufflé :

« Enfin... Je crois qu'ils sont loin, mais... nous devrions attendre un peu avant de sortir. Juste au cas ou. » Je continuais de chuchoté également, par précaution surtout. Car j'étais on ne peu plus certain qu'ils étaient à présent loin. Néanmoins, ils pouvaient revenir, ils n'avaient pas de pensées que je pouvait capter et utiliser à notre avantage. Je n'avais fait qu'avec des suppositions et mes connaissances du sujet. Après tout... j'étais plus souvent à leur place qu'a celle que j'occupais à présent. Quoi que... contrairement à eux, je ne perdait pas mes proies de la sorte.

« Je... ça mérite quelques explications... Mais... Tu vas penser que je suis dingue. » Finis-je par murmurer, la relâchant pour m'éloigner autant que le permettait notre cachette.

Alors qu'elle était dans mes bras, d'abord pétrifiée semblait-il, elle avait semblé se détendre. Ou du moins, trouver dans mon geste le courage ou la force de bouger. Ça n'avait été que pour glisser ses mains dans mon dos et me serrer contre elle en retour. Mais c'était déjà pas mal compte tenu de la situation.

J'avais relâché mon étreinte quand j'avais avoué lui devoir des explications, puis j'avais reculé légèrement. Autant que le permettait notre cachette. Evelyne s'était raidie de nouveau, ramenant ses bras à elle, après avoir tenté de défroisser ma chemise là ou elle avait serré. Et j'avais attendu qu'elle me pose la question qui semblait lui brûler les lèvres, malgré la peur. J'aurais pu parler, donner ma version des choses et compter sur sa confiance en moi, pour le reste. Mais ça n'était pas intelligent. Je devais savoir ce qu'elle avait compris avant. Dans ce qui s'était passé, mais surtout dans ce que j'avais sous-entendu avec « des explications ». J'ignorais ce qu'elle avait vu exactement pour mon don de télékinésie, mais elle avait vu quelque chose c'était certain. Pourtant, elle avait commencé en m'interrogeant sur les créatures qui nous avaient attaqués. Intéressant de voir que les chiens étaient la priorité pour elle. Ça m'en disait long sur comment appréhender la suite. Ils représentaient un danger évident pour les humains, donc c'était normal. Mais étant dans son cercle de connaissances et m'ayant vu user de pouvoirs... pas naturels... ça aurait du passer en priorité si ça l'avait dérangée. Car j'étais une 'anomalie' plutôt présente dans sa vie.

« Des chiens de l'Enfer... » Soufflais-je, honnête et ne cherchant pas à tourner autour du pot. Non seulement parce que je savais qu'elle avait confiance en moi, au moins dans une certaine mesure. Mais également parce que mentir n'aurait servit à rien dans pareilles circonstances !

« Ces choses sévices depuis février. Ça n'a jamais été des animaux. Quoi que... J'imagine qu'ils le sont plus ou moins. » A présent, que j'avais répondu à sa question, il était temps d'adresser le reste. C'était mieux si je le faisait moi, ne serait-ce que pour diriger la discussion.

« Il y a un tatouage magique qui permet de les voir. » Ça n'était pas la raison qui me permettait de les voir, mais ça je n'allais pas lui dire.

« Je sais que ça doit paraitre invraisemblable et que je te dois également des explications sur ce que j'ai fait là-bas, pour les repousser. Mais ça n'en est pas moins vrai. C'est pas des choses dont je parle facilement. C'est un tout autre monde, plein de dangers... Je n'avais pas prévu que tu sois forcée dedans. »

J'inspirais, comme pour trouver du courage, alors qu'a la place je choisissait au mieux, mes mots. Puis ajoutais :

« J'ai un don de télékinésie, c'est ce que j'ai utilisé sur ces créatures, plus tôt. » Tout ce que j'avais dit était véridique. Je n'avais pas menti, seulement retenu une partie des informations. C'était la meilleure manière de gérer la situation. Ça et à présent attendre sa réaction. Car je me demandait quelle serait sa réaction à propos de mon don. Elle semblait y avoir accordé moins d'importance, comme je l'avais remarqué. Ce qui était positif, mais ce qui me laissait me demander pourquoi ? Est-ce qu'elle avait encore plus confiance en moi que je ne le pensait ? Est-ce qu'elle savait quelques choses sur le surnaturel, elle-même ? Les deux ? Autre chose ? Elle-seule pouvait répondre à ça.

Elle ne paniquait plus. Maintenant que le danger s'était éloigné, ce malgré les révélations que je venais de lui faire... Elle restait calme et pour moi ça ne pouvais vouloir dire que deux choses ! Soit elle savait déjà pour le surnaturel. Soit elle était en état de choc. Mais la théorie du choc s'était éclipsée bien vite, aussitôt qu'elle a parlé et montré qu'elle en était capable. Mais aussi, surtout vu quels avaient été ses mots ! Un sorcier ? C'était la question qu'elle avait posé. Pas, qu'est-ce que tu es ? Comment tu as fait ça ? Pas de doutes ou de refus de me croire... Elle m'avait demandé si j'étais un sorcier.

« Non, je ne suis pas un sorcier. » J'avais répondu sans détour, car je n'allais pas mentir à ce sujet. Non seulement parce que ça aurait été un mensonge difficile à maintenir, compte tenu que j'étais incapable de faire des sorts, potions ou autres trucs de magie terrestre du genre. Mais aussi et surtout parce que sa question me laissait penser soit qu'elle était une sorcière, soit qu'elle en connaissait ! Cela expliquerait beaucoup de choses. A commencé par le fait que mon pouvoir ne l'inquiétait pas, tout comme sa facilité à accepter mes explications surnaturelles...

« Je suis télékinésiste, mais je ne pratique pas la magie. Certains appellent ça humains dotés. D'autres, dotés divins. Des êtres humains avec un don confié par Dieu à leur naissance. » Encore une fois, il n'y avait pas de mensonge dans mes mots, c'était ce qui rendait si facile le jeu d'acteur qui allait avec. Je n'avais pas dit être un humain doté, je l'avais seulement sous-entendu, ou lui avais laissée faire le calcul toute seule. Le meilleur moyen de convaincre un humain de quelque chose, ça n'était pas de débattre, mais de le laisser arriver seul à une conclusion.

Toujours contre elle, j'avais pris une inspiration, cherchant dans son regard avec une appréhension que je n'aurais presque pas eu besoin de feindre.

« Tu... Tu n'as pas peur de moi ? De mon pouvoir ? » Je me taisais et prétendait réfléchir et réaliser seulement maintenant certains de ses mots. Justifiant ma question suivante :

« Attends, tu... Tu m'as cru, sans sourciller. C'est pas le genre de choses que les gens croient aussi facilement, en général. Tu savais déjà ? Pour le surnaturel, pour... Sorcier... Tu m'as demandé si j'étais un sorcier. Tu en connais ? Ou... tu en es une ? Une sorcière ? » C'était les deux options et c'était une question que je me devais de poser. Compte tenu de ce que j'avais révélé, c'était pas une demande insensée ou illégitime. C'était même tout le contraire, car j'avais été le seul à passer aux aveux, même si je n'avais clairement pas tout dit sur moi.

« Dire que je t'ai caché ce monde, pendant tout ce temps. Pensant te protéger... Mais l'un comme l'autre, on savait tous les deux... C'est presque comique. » Ajoutais-je avec un léger sourire, presque timide. Quoi que soit sa réponse sur les sorciers, elle savait. J'en était persuadé. Sa manière de répondre à mes révélations n'était pas celle de quelqu'un tout juste plongé dans ce monde. Je le savais d'expérience, sur plus de quatre mille ans. Je n'avais pas été le seul à garder des secrets, même si les miens étaient probablement plus nombreux.

Compte tenu qu'elle m'avouait à présent être bel et bien une sorcière, l'aspect comique de la situation ne faisait que s'intensifier. Une sorcière... Moi qui l'a trouvais déjà intrigante, avant ça. Elle avait d'autant plus titillé mon intérêt avec son aveu. Bien entendu, le « j'y travaille. » qu'elle avait ajouté, ternissait un peu le tableau, mais... J'étais près à passer l'éponge là-dessus. Après tout, même si je supposait que ça voulait dire qu'elle était novice, ça n'était pas si grave. Il fallait bien commencer quelque part, non ? Tout s'apprenait...

« Je vois. » Je réagissait, ne montrant ni excitation, ni peur ou autre émotion du genre. Je me montrait seulement attentif est intrigué attendant d'en savoir plus, écoutant ce qu'elle avait à me dire. Et je faisais bien, puisqu'elle avait enchainé avec une autre admission, ou plutôt deux. Une télékinésiste. Et une qui ne maîtrisait pas très bien son pouvoir. J'aurais pu en rire, si je n'était suffisamment intelligent pour savoir retenir la chose. Non pas pour me moquer, mais sur le comique de la situation. Car elle admettais justement être novice dans l'utilisation d'un con, que je maitrisait depuis des millénaires. A la place de rire, j'étais donc resté stoïque, avant d'ajouter :

« Si tu ne le maitrise pas, c'est normal. Tu as bien fait de ne rien faire. Surtout si tu ne les voient pas. » Je ne disais pas ça pour la rassurer, même si c'était tout de même le but. C'était aussi purement vrai. La dernière chose dont nous avions besoin à ce moment là, c'était qu'elle utilise un don instable sur des adversaires qui lui étaient invisibles. Qui sait ce que ça aurait pu provoquer et les autres choses que j'aurais du faire pour la protéger ou pour m'expliquer.

« Je maitrise mon don, depuis le temps que je l'ai. J'ai appris à le contrôler. Si tu le veux... je peux t'aider à apprendre. Pas maintenant, bien sûr mais... » J'avais marqué une pause, prétendant écouter, mais surtout cherchant l'aura surnaturelle des créatures. RIEN !

« Je pense qu'ils sont loin et qu'ils ne reviendrons pas. Ils n'ont pas l'air en tout cas. On devrait sortir d'ici... »

Cette cachette était étroite et même si je n'était pas dérangé par cette proximité, il fallait rester raisonnable. Je m'étais extirpé, évitant de faire trop de bruits, au cas ou et pour rassurer l'humaine, ou plutôt la sorcière à mes cotés. Puis, j'avais tendu la main pour me saisir de la sienne et l'aider à sortir au travers des planches et autres conneries que les chiens avaient déchiqueté pendant qu'ils nous cherchaient.

« Une sorcière... Qui l'aurais cru... Toutes ces cachoteries qu'on a fait. Pour le bien de l'autre, certes. Mais... Tout ça et au final, nous avons le même pouvoir et nous savons pour le surnaturel. » Je riais légèrement et finissait par lui demander :

« Est-ce que ça va ? Ces bêtes, toute la situation... Je comprendrais si tu étais chamboulée. » J'avais prévu de la raccompagner à sa voiture, au départ. Avant l'attaque. Mais à présent...

« Est-ce que tu veux qu'on retourne au bureau ? Que je t'offre un verre de quelque chose de... fort et... qu'on parle de tout ça ? Je te conduirais jusqu'à ta voiture ensuite... Ou mieux. Nous pourrions aller jusqu’à ta voiture, l'amener dans le parking sous-terrain avec mon pass et boire un verre. Ensuite ta voiture serait déjà sur place pour repartir. » La proposition, jusqu'au dernier détail, n'était que ça. Je n'allais pas la forcer si elle ne voulais pas. Mais je devais bien avouer qu'a présent, je n'avais plus envie d'en rester là.

Elle semblait reconnaissante vis-à-vis de ma réaction quant à sa nature. Elle avait sourit en tout cas. Le reste de la discussion s'était donc passé sans encombre, jusqu'à ce que j'en vienne à ma proposition. Je voulais qu'elle accepte, même si je lui laissais le choix, j'espérais qu'elle dise oui et qu'on puisse parler plus en avant de tout ça. Car je ne prétendais rien quand ça concernait ces aveux de ce soir. Je n'avais aucune idée qu'elle savait pour le surnaturel, ou qu'elle était une sorcière. J'avais envie d'en apprendre plus, de parler avec elle. Pourtant, elle semblait vouloir couper court à la discussion. Elle avait l'air de dire que c'était pour se sentir en sécurité et j'aurais pu la croire. Si seulement elle n'avait pas ajouté la suite ! « Et peut-être que tu devrais faire de même… Cameron risque de s’inquiéter, surtout qu’il est déjà tard. »

Cette référence à Cameron m'avait interpellé. Je l'avait mentionnée plus tôt, oui. Mais pour dire que je la voyait dans deux jours. Les deux soirs qui suivaient, elle était prise. Elle travaillait au club. J'avais une petite idée de ce qui avait provoqué cette phrase de la part de la sorcière. Une grosse idée, pour être honnête ! Et je ne pensait pas me tromper. Je retenais le sourire qui voulait se dessiner sur mes lèvres et à la place, j'ajoutais :

« Cameron travaille ce soir et demain soir. Elle n'a que dimanche de libre, alors... Pas de risque qu'elle m'attende ou s'inquiète. Mais c'est comme tu préfères. J'ai envie de parler de tout ça, c'est vrai. Mais si tu as besoin de souffler, seule... Je comprend. »

Je n'insistait pas réellement, mais je lui laissait pourtant une dernière occasion de changer d'avis. J'espérais qu'elle l'a prenne, car je ne voulais pas en rester là. C'était l'occasion parfaite pour discuter de ce genre de choses, plus que quand les bureaux étaient pleins. La, au moins, nous serions tranquilles.

« Quoi qu'il arrive, on doit aller jusqu'à ta voiture. » Fis-je avec un sourire rassurant, avant d'avancer. Une fois arrivé à son véhicule, elle n'aurait qu'a décider si elle voulait qu'on aille jusqu'au parking sous-terrain, ou si elle rentrerait chez elle. J'ignorais si un temps de réflexion jouerait à mon avantage ou non. C'était une possibilité ! J'aurais pu m'en assurer avec mes dons, mais je n'avait pas prévu de m'en servir sur elle. Qu'elle soit une sorcière ne changeait pas ça. Alors, je devrais laisser les choses se faire, sans garantie. De toute façon, j'aurais toujours d'autres occasions de parler avec elle, non ?

Nous n'étions plus très loin et avions rapidement rejoins sa voiture. Je la toisais donc, attendant de voir si elle me disait au revoir, ou si elle m'invitait à monter dans sa voiture pour prolonger cette soirée.

Le trajet jusqu'à sa voiture ne lui avait donné qu'un tout petit temps de réflexion, mais ça avait suffit semblait-t-il. Parce qu'elle était revenue sur son idée première et acceptait de continuer la soirée avec un verre et la discussion que j'avais proposé.

Elle disait vouloir rester le temps que la pression baisse et qu'elle se sente davantage de rentrer, surtout avec les chiens et l'attaque récente. Je ne pouvais pas la contredire sur ça, même si ça n'était pas la raison que je préférait la voir utiliser. De toute façon, j'avais tendance à croire que ça n'était qu'une façade, compte tenu de ce qu'elle avait dit juste avant au sujet de Cameron. Ma théorie, c'était qu'en donnant cette explication, elle espérait se convaincre elle même que c'était pour cela qu'elle restait, plus qu'elle ne me donnait une véritable raison. Certains pourraient dire qu'il s'agissait de mon égo. Et j'en avait. Mais il était rarement mal placé. Je savais lire certains signes, même sans mes pouvoirs pour m'aider. Après autant d'années au compteur, encore heureux, d'ailleurs !

Ma réponse a sa décision avait été simple et ponctuée d'un sourire :

« J'avoue que ça me rassure un peu, également. » Je n'avais pas fait tout ça pour rien. La protéger, la sauver même... Je l'avais voulu, j'avais fait des efforts pour ça. Ça n'était pas pour qu'elle se fasse attaquer juste après, en sortant de sa voiture. Alors oui, c'était une raison de plus en faveur de sa décision. Attendre un peu, ne ferait pas de mal pour que ces foutus chiens passent à autres chose.

Après ces quelques mots, j'étais monté avec elle en voiture, car c'était la seule chose qu'il me restait à faire. Nous n'avions pas eu le temps de discuter des masses dans la voiture, le trajet était cours avec un véhicule et j'avais surtout parlé pour lui donner quelques indications pour simplifier le trajet jusqu'à l'entrée du parking. Je lui avait tendu mon badge pour qu'elle puisse débloquer l'entrée, puis nous avions rejoint une place proche de mon ascenseur personnel. Une nouvelle fois suivant quelques petites indications, car il n'était pas indiqué. Le mot d'ordre étant « personnel ».

Lorsque nous étions sortis de ce dernier, directement dans mon bureau, j'avais souris et lancé pour briser la glace :

« Une double dose de quelque chose ? » La touche d'humour dans ma voix ne laissait pas de doute quant à la volonté derrière. J'essayais de détendre l'atmosphère face à l'attaque que nous avions essuyé. Cela dit, un verre d'alcool aiderait pour la pression dont elle parlait, tout comme pour l'apaiser un peu. Et c'était ce que j'avais proposé à la base.

« Qu'est-ce que je t'offres ? » Le minibar qui se trouvait dans l'angle droit de la pièce, face à nous, était déjà ouvert. Lui laissant choisir le poison de son choix. Il y avait plusieurs alcools, mais aussi deux ou trois soft et de l'eau en bouteille. De quoi ravir la plupart des gens que je recevais entre ces murs.

Malgré l'humour dans ma voix quand j'avais proposé la double dose d'alcool, je savais que ça ne serait pas une mauvaise chose compte tenu de la soirée que nous venions de passer. Elle avait clairement besoin de faire passer la pilule, ou plusieurs rendu là et le double whisky qu'elle m'avait demandé aiderait.

J'avais servit son verre, lui avait tendu, puis m'était servit la même chose. J'aimais son choix de « poison », car c'était le mien également. Elle avait alors lancé les hostilités, m'indiquant vouloir être totalement honnêtes et j'avais hoché la tête positivement avant d'ajouter :

« Je pense que ce sera plus simple, en effet. » J'allais être honnête, autant que le permettait la situation en tout cas. Nous avions quelques informations communes et connues, mais il était temps d'établir les bases. Je buvait une gorgée de whisky, comme pour me donner du courage et demandait finalement :

« J'imagine qu'établir les choses, ce que chacun sait, serait pas une mauvaise idée également... histoire de... simplifier la discussion. » Je lui offrait un sourire et m'approchait, m'installant sur l'un des fauteuils avant de l'inviter à faire de même.

« Donc... tu sais pour les sorciers, forcément. Pour les chiens de l'Enfer, à présent... Est-ce que tu sais, pour le reste ? » Anges, déchus, démons, possédés, prophètes... et c'était sans compté les créatures plus particulières, ou les entités comme les cavaliers. Qu'est-ce qu'elle savait au juste ? Elle savait au moins une chose, j'en savais plus qu'elle. Je n'allais pas en faire un secret. Après tout, nous avions parlé d'honnêteté.

« J'ai ce pouvoir de naissance. J'ai appris à le contrôler il y a longtemps et avec les années... à le maîtriser. » Il n'y avait une fois de plus aucun mensonge dans ces déclarations, car ma véritable naissance était ma sortie de l'Enfer. Je ne me rappelais plus de l'humain que j'avais été et n'en éprouvait pas du tout l'envie.

« Quand as tu découvert pour ton don ? Ou que tu étais... une sorcière ? »

Je donnais quelques informations me concernant, posait des questions... j'essayais de mixer les deux au mieux. L'idée n'était pas de tout apprendre sur elle sans rien offrir en retour, après tout. D'ailleurs, elle pouvait me poser toutes les questions qu'elle voulait.

« Je pense qu'on peux se faire confiance. Je sais que je te fais confiance depuis le départ, sinon je ne t'aurais pas demandé de travailler pour la fondation. Alors... tu peux me poser toutes les questions que tu veux. J'y répondrais. »

Autant mettre cartes sur table. Je n'étais pas sûr de ce qu'elle voulait que je dise exactement et préférait qu'elle m'interroge clairement, plutôt que de broder autour de suppositions. Comme avec la télékinésie, j'étais du genre à aimer contrôler une situation.

Elle avait entreprit d'énumérer les créatures après que j'ai mentionné "le reste". Une chose était sûre, elle en savait déjà pas mal, malgré tout, elle ignorait encore quelques petites choses semblait-il. On avait parlé d'honnêteté et je n'étais pas limité dans ce que je pouvais dire au sujet du monde surnaturel dans son ensemble. Aussi, j'avais entrepris de compléter sa liste, afin de jouer le jeu à mon tour.

« Mais aussi les prophètes, les possédés, les nephelims... » Soufflais-je, ne l'interrompant pour autant pas. Elle aurait tout le temps de m'interroger sur ces créatures plus tard, si vraiment elle ne les connaissaient pas. Pour le moment, j'avais clairement plus urgent en tête et plus précis. Sa nature, la sorcière qu'elle était et son don. Voila ce qui m'importait le plus. Alors, après avoir parlé de mon don, j'avais laissé la place à Evelyne.

Son récit avait été ponctué de petites pauses, qu'elle ai besoin de reprendre son souffle, de boire et se donner du courage, ou le temps de réflexion... J'avais écouté sans piper mot ce qu'elle avait pris sur elle de me raconter. Tout humain que je n'étais pas, je n'étais pas stupide et je savais pertinemment qu'il lui fallait du courage et une profonde confiance en moi pour se confier, comme elle le faisait. J'avais marché pendant qu'elle me parlait, prenant soin de ne pas faire de bruit ou de ne pas l'interrompre à cause d'un geste brusque. J'écoutais toujours, pendu à ses lèvres, alors que je me rapprochait du bar. J'avais saisi la bouteille de whisky voyant son verre se vider et était ensuite revenu sur mes pas, continuant jusqu’à elle. Tout geste, comme une main, une moue compatissante... me semblait déplacé. Aussi, j'avais opté pour quelque chose d'un peu plus particulier et selon moi, plus respectueux.

J'avais versé une dose d'alcool dans son verre, le remplissant de nouveau. Puis, j'avais déposé la bouteille sur la table entre nos deux fauteuils, avant de me rasseoir.

« Je ne vais pas prétendre que je comprend, parce que... c'est impossible, sans l'avoir vécu. Ce que je peux dire, cela dit, c'est que tu n'as plus à avoir peur de toi. De ton pouvoir... Je t'ai vu aux entrainements de boxe, je t'ai vu travailler pour l'association... Tu as une force de détermination importante. C'est ce dont tu as besoin pour contrôler ton don. Tu l'as déjà en toi. Il suffit de savoir comment faire. Et je peux t'aider pour ça. » J'avais toujours plus ou moins su que la cause de la fondation lui tenait à cœur. Mais aujourd'hui, alors que j'en apprenais plus sur son passé, je savais à quel point.

« Quant à la manière dont ton don à fait surface... La destruction que tu décris... Ça n'est pas ta faute, tu en à conscience ? La télékinésie peut être dévastatrice, comme beaucoup d'autres dons. Mais ça n'est pas sa fonction première. C'est une force mentale accrue, avant tout. » Encore une fois, je ne mentais pas et j'en savais quelque chose en ce qui concernait les pouvoirs dévastateurs. J'essayais de la consoler, certes. Mais ça ne rendait pas la chose moins vraie. J'avais levé mes mains au dessus de la table entre nous, pour aller chercher les siennes, paumes contre paumes.

« La deuxième étape, c'est d'apprendre à diriger ta volonté. Le plus simple quand on commence, c'est de le faire au travers de ses mains... » Mais la seule, véritable solution, pour qu'elle contrôle son pouvoir, c'était qu'elle accepte son passé. D’où mes mots ou gestes réconfortants.

« Mais la première étape, c'est d'accepter ce que tu es. Ainsi que ce qui s'est passé à l'époque, n'était en rien de ta faute. Tu étais une enfant. Tu as subit des choses inimaginables et en a vu tout autant... La seule responsable, c'est elle. Ton don aurait pu se déchainer plus tôt. Mais je pense qu'il était dormant, de part ta bonne nature. Ton altruisme. Ce n'est que quand la menace de la mort s'est fait encore plus réelle, qu'il... s'est réveillé. Mais je doute qu'il voulait détruire quoi que ce soit. Je pense sincèrement, qu'il voulait seulement te protéger. Tu ne savais juste pas comment. » Parler de dons était plutôt facile, même s'il s'agissait d'en parler de cette manière. Car c'était quelque chose que je maitrisait. J'avais de nombreux dons depuis des millénaires, en avait vu de nombreux autres à l’œuvre... Quant à la partie sur son passé, elle était en effet indispensable. Car son pouvoir pouvait être impacté par ses émotions si elle ne parvenait pas à les dissocier.

« Je peux t'apprendre à le maîtriser. » Sans lâcher ses mains, j'avais levé les yeux vers mon verre de whisky sur la table d'appoint et l'avais fait léviter légèrement dans les airs avant de le reposer délicatement.

« Pas de destruction, pas de fracas... Seulement un contrôle complet. » Ma démonstration avait pour but de prouver cela, mais également ma capacité de contrôle. Car mes mains étant toujours dans les siennes, elle savait pertinemment que j'avais dirigé ma volonté par mon regard seul.