La sorcière en était au dernier trimestre de sa deuxième année à l’université. Elle avait survécu aux cours les plus déprimants, aux partenaires les plus pénibles et aux professeurs les plus assommants. Il fallait dire qu’elle méritait une médaille pour ne pas avoir commis de meurtre, surtout après que son quotidien en ait pris un coup. La seule chose qui la maintenait encore un peu lucide était le solanum, qu’elle avait pris l’habitude de prendre en quantité importante. Les effets secondaires que lui procurait le produit lui permettaient de jumeler sa vie étudiante, son apprentissage de la magie et ses exercices de magie noire. Il ne lui restait que peu de temps pour réfléchir à toutes ces choses qu’il lui avait dit, toutes ces choses qu’elle avait dites et tous ces non-dits qui l’étouffaient. Il était parti de sa vie de la même façon qu’il était apparu, mais avait emporté le peu de lumière qui restait au creux de son être. Cette douleur, qui ne voulait pas s’estomper l’obligeait à maintenir un niveau de concentration perpétuel, espérant ainsi qu’il ne viendrait pas hanter son esprit bien occupé. La brune poussa un profond soupire alors qu’elle déambulait lentement entre les murs de l’institution, il lui semblait stupide de souffrir autant pour un être qui avait passé tel un coup de vent dans sa vie.

Dans l’espoir de retrouver un peu de cet enthousiasme perdu au fils des derniers mois, Yesla avait décidé de s’inscrire à un cours portant sur les sciences occultes. Par chance, la plage horaire s’inscrivait parfaitement entre deux de ses cours obligatoires, et si elle devait le voir comme d’un signe, la brune avait surtout l’impression que le destin allait lui jouer un mauvais tour. Après tout, depuis quand est-ce qu’elle avait ce genre de chance? Quelque chose se tramait.

Ayant dorénavant pris l’habitude d’arriver à l’heure, cela faisait maintenant quelques minutes que la sorcière était assise à l’extrémité de la dernière rangée, les yeux rivés sur son téléphone portable. Il n’y avait qu’une poignée d’étudiants dans la classe, mais déjà, ils lui semblaient tous sans importance. C’était une bonne chose que Yesla n’était pas là pour se faire des amis. Elle en avait peu, et déjà, elle en avait trop. Occupée à éprouver un profond désespoir face à une discussion qu’avaient deux jeunes femmes, une voix provenant de l’avant de la salle la tira de sa torpeur. Mais d’où connaissait-elle cette voix?

▬ Putain, c’est une blague? murmura-t-elle pour elle-même alors qu’elle venait de lever les yeux vers la rouquine au-devant de la classe. C’était cette pimbêche, la sangsue personnelle de Caleb en personne, Clarke. Yesla jeta un rapide coup d’œil à la porte, effleurant l’idée de foutre le camp et de ne plus avoir à supporter la présence de cette sale rouquine, mais cette dernière avait déjà entamé la présentation de son cours, et la sorcière avait déjà payé le trimestre. Il fallait dire que son cours s’annonçait, malheureusement pour elle, des plus intéressants, bien que celle qui le présentait lui donnait envie de se jeter par la fenêtre. C’était bien sa chance.

Une fois le premier cours terminé, Yesla avait traversé le flot d’étudiants à contre-courant afin de rejoindre, avec une certaine amertume, l’être qu’elle aimait le moins sur cette foutue terre. Mais il fallait bien avouer que cette pimbêche pourrait bien lui apprendre certaines notions concernant les sciences occultes. Il fallait maintenant déterminer si cette volonté était suffisante pour outrepasser cette envie de détruire que lui octroyait sa simple présence.

▬ Salut fit la sorcière alors qu’elle s’approchait de celle qui portait bien des surnoms, bien qu’aucun ne puisse être prononcé à haute voix. Je savais pas que c’était toi qui donnais le cours, mais ton plan de cours a l’air intéressant. J’aimerais bien rester, mais il faudrait que je sache tout de suite si tu as l’intention de me pourrir mes notes. ajouta-t-elle d’un ton qu’elle voulut le moins provoquant possible, ce qui, compte tenu de la situation, était un exploit.

J'avais quitté la bibliothèque de la fac un peu avant le début de mon cours, mes recherches personnelles étaient bien au chaud dans mon sac quand j'étais entrée dans l’amphithéâtre. Les étudiants étaient déjà là, alors je n'avais pas perdu de temps.

Ma voix s'était levée pour annoncer le sujet que nous entamions aujourd'hui, un qui m'étais particulièrement familier. « Les arts divinatoires. Ces mots semblent simple et pourtant, ils englobent énormément de pratiques et de cultures différentes. Est-ce que quelqu'un peut m'en citer plusieurs ? Aussi variés que possibles ? »

Un élève avait levé la main et je lui avait donné la parole, écoutant avec attention sa réponse :

« cartomancie, arithmomancie, astrologie... » Je l'avais néanmoins coupé pour compléter sa réponse.

« Ces pratiques font effectivement partit des arts divinatoires. Mais j'attendais une réponse un peu plus... éclectique. » Je prenais une légère inspiration et continuais :

« La divination peut avoir plusieurs formes, qu'elle soit sous celle de bandes de papiers comme pour les omikuji au Japon, ou à travers l’interprétation de signes créés par la nature comme c'est le cas pour les augures, ou même le jet de runes pratiqué par certaines civilisations nordiques, ou encore par l'interrogation des défunts par le biais de la nécromancie... Cette liste pourrait continuer encore longtemps mais nous nous concentrerons durant ce trimestre sur seulement quelques pratiques... »

J'avais continué mon cours, expliquant les arts que nous allions étudier plus précisément durant ce trimestre, avant de débuter avec le premier : les augures. En temps que sorcière, qui plus est aux dons divinatoires, j'étais toute indiquée pour parler du sujet, même si les cours étaient traités de manière purement théorique.

L'heure qui avait suivi, j'avais ainsi continué mon cours magistral, les laissant prendre note et me poser ça et là des questions. Tout s'était déroulé parfaitement, et alors que les étudiants commençaient à sortir de la salle, j'étais revenue à mon bureau afin de ranger les quelques affaires que j'avais sortit pour illustrer le cours. Une voix m'avait alors forcé à relever le regard, et j'avais presque pu sentir mon estomac se nouer en comprenant à qui elle appartenait. Si la présence de la sorcière était déjà suffisante en soit pour être désagréable, les paroles qui avaient suivit son « Salut » m'avaient elles foncièrement dérangées.

« Je suis professeur, je ne note pas en fonction de l'individu, mais du travail fourni. » Avais-je répondu sans détour, avant d'ajouter : « Et en partant du même prémisse, j'attends une certaine marque de respect venant de mes étudiants. Et ça passe par le vouvoiement. Commençons déjà par ça, avant de suggérer que je suis partiale ou injuste dans ma notation... »

Suivre mon cours ? Sérieusement ? J'avais tout fait pour la couper de ma vie au maximum et voila qu'elle était inscrite dans ce cours ? J'étais tentée de lui dire d'abandonner, mais ça n'était pas professionnel. Aussi, j'avais opté pour une autre solution.

« Autant prévenir. Je suis sévère dans ma notation, même si ça vaut pour tout le monde. Ce cours ne fait pas partit du cursus obligatoire et nombreux ceux qui le prennent en croyant à une note facile. Ça n'est pas le cas. Les cours ne vont faire que s'intensifier, tout au long du trimestre et les informations à retenir seront de plus en plus nombreuses et complexes. Peu d'étudiants valident ce cours supplémentaire sans être dans le cursus complet que l'université propose et que je tiens également. » Mes explications terminées, j'en était venue à la question à un million : « Alors, la question est plutôt, est-ce que je dois m'attendre à une intervention du genre à chaque fois que la note que vous obtiendrez ne refléteras pas ce que vous croyez mériter ? »

De tous les êtres désagréables de cette ville, il fallait que ça soit elle. La brune se demandait si elle devait en rire, ou en pleurer. Dans tous les cas, il fallait qu’elle tente de se comporter du mieux qu’elle le pouvait, ce qui, avouons-le, œuvrait du miracle. Bien que son comportement général s’était amélioré, chose qui était due principalement à Caleb, cette fichue rousse avait le don de lui donner une envie irrépressible de meurtre à chaque fois qu’elle ouvrait la bouche. Bien entendu, la sorcière pourrait toujours s’y faire dans un contexte pédagogique, mais Yesla savait qu’elle n’aurait pas la chose facile avec Clarke, et qu’elle débutait déjà avec une prise.

Fidèle à elle-même, la rousse lui avait répondu d’un ton tout à son image, l’invitant, avec toute la politesse qu’elle pouvait faire preuve, à la vouvoyer. La sorcière étouffa un ricanement face à son hostilité. Lui tenait-elle encore rigueur pour la dernière fois ou était-elle toujours aussi agréable à côtoyer? Encore une question qui resterait sans réponse.

▬ J’ai pas encore décidé si tu étais mon professeur. Alors, tu m’excuseras, mais d’ici là, je vois pas la pertinence de te vouvoyer répondit la sorcière alors qu’elle tentait de prendre un ton poli, ce qui dénotait presque avec ses propos.

▬ C’est drôle, le contraire m’aurait étonné répondit-elle d’un ton ironique alors qu’elle faisait tout pour ne pas rouler des yeux. La sorcière se faisait intérieurement violence alors qu’elle écoutait la rousse sous-entendre qu’elle n’aurait pas le calibre afin d’exceller dans son cours. Comme si elle avait la prétention de pouvoir la connaître. La brune se mordit la langue, se rappelant qu’elle avait dorénavant promis à Caleb qu’elle allait bien se tenir en présence de la grognasse. Chose qui était manifestement plus difficile que prévu. Et merde.

Après avoir déballé son discours d’encouragement, de persévérance et de conneries en tout genre, la rouquine lui avait posé sa fameuse question, celle qui allait apparemment déterminer son destin et possiblement le motif derrière le meurtre de cette harpie. Allait-elle décider de poursuivre ce cours, quitte à se pourrir la vie mutuellement, ou bien allait-elle prendre ses jambes à son coup? Le choix était difficile. Le premier présentait certains avantages. Il fallait dire qu’elle pourrait toujours contempler son désespoir à chaque fois que leurs regards se croiseraient en classe. D’un autre côté, aurait-elle réellement la force de supporter cette chipie? Un semestre, ça pouvait être long. Très long, voire pénible. Ne voulait-elle pas prendre ce cours pour se changer les idées? C’était plutôt mal parti.

Il fallait dire que Clarke s’était vraiment démené afin de la dissuader quant à poursuivre son cours, ce qui méritait presque ses félicitations, puisque Yesla y était de plus en plus tenté. On dirait presque tu t’appliques vraiment pour ne pas que je reste. Je pourrais presque penser que tu ne m’aimes pas fit la brune d’un air amusé alors qu’elle croisait les bras contre sa poitrine.

J'aurais du me douter que cette petite idiote répondrait de la sorte. Elle ne semblait jamais réfléchir aux conséquences de ses actes ou de ses paroles, preuve à l'appuie : notre rencontre. Je la toisais, mon agacement se transformant en colère et rétorquais quelques mots avec mépris.

« Pourquoi perdre ton temps dans mon cours puisque quoi que je dise, tu n'écoutes rien ? »

Je haussais le ton, perdant patience avec elle et avec la situation qui était grotesque avouons-le et j'ajoutais :

« A partir du moment ou nous sommes dans l'enceinte de l'université, et qui plus es dans la salle ou je fait cours, c'est professeur Spencer pour toi. Que tu le veuilles ou non, que ça te semble pertinent ou pas. Puisque tu as déjà prouvé que tu n'es pas en mesure de juger de la pertinence ou des dangers d'une situation. » C'était petit et je la jugeait, oui. Mais notre passif me donnait raison et surtout... c'était plus fort que moi. Elle agissait ou parlait avant de réfléchir et c'était une très mauvaise chose, de manière générale, mais encore plus pour une sorcière. Et à force d'agir comme elle le faisait et de m'offrir ses réflexions désagréables et son attitude... J'en avait eu assez. Tant et si bien qu'a sa dernière pique... j'avais saisi l'opportunité, malgré l'endroit ou nous nous trouvions.

« Si tu as encore un doute, c'est que je n'ai pas été assez claire, alors. » Fis-je avec un sourire qui en disait long sur mes sentiments à son égard. Mais je ne m'étais pas arrêtée là, sans que je sache pourquoi ou comment les mots continuaient de sortir et je m'étais surprise à dire des choses qui n'auraient jamais du franchir mes lèvres dans la situation ou nous étions.

« Tu n'as rien à faire dans mon cours. Tu es une pâle imitation de sorcière. Tu ne réfléchis à rien, tu es têtue, malpolie, insolente et tu ne sais ni quand arrêter, ni reconnaitre quelqu'un de plus puissant que toi. »

Les mots étaient sortis malgré moi, et ça n'était pourtant pas fini. J'avais plus à dire encore et apparemment je n'était pas en mesure de me brider.

« La seule raison pour laquelle Caleb aurait pu accepter de t'aider ce serait à cause d'un potentiel caché... Alors quoi ? » Je marquais une pause réfléchissant aux possibilités. Vu la manière dont elle ne respectait rien, pas même Caleb ou leur rendez-vous, il n'y avait pas beaucoup de possibilités. Ça n'était pas sa dévotion à la magie ou à son mentor, ça n'était pas sa puissance non plus selon moi -et ça c'était un jugement purement gratuit-, alors...

« Sorcière de lignée ? Tu dois son aide aux sorciers avant toi, c'est ça ? » Je riais légèrement, et ajoutais :

« Oui, c'est forcément ça. Parce que c'est bien la seule chose qui pourrait laisser supposer un potentiel suffisant pour que Caleb vous aient supportés toi et tes conneries plus de deux secondes. »

Je soufflais un rire, suggérant que le mot connerie était même un euphémisme la concernant, et renchérissait.

« J'ignore si tu crois simplement que tout t'es du ou si tu es assez stupide pour penser être à la hauteur pour Caleb ou ne serait-ce que mon cours... Mais il est peut-être temps d'ouvrir les yeux, Yesla. La magie c'est sacré. C'est une pratique millénaire et ce n'est pas en manquant de respect à des siècles de sorciers avant toi, ou en ignorant ses règles que tu réussiras à gagner en connaissances ou en capacités. »

La brune n’eut comme réponse qu’un roulement de yeux, agacée. Évidemment, elle se permettait encore de lui faire la morale, alors qu’elle ne connaissait absolument rien d’elle. Quelle surprise! Est-ce que Yesla était imprudente? Oui, tout à fait. Mais ça, qu’est-ce que ça pouvait lui foutre? Ce n’était pas comme si elle avait besoin d’une germaine qui voulait diriger sa vie. Bon, elle avait appris assez rapidement que ce n’était pas une bonne idée de faire n’importe quoi, surtout en présence d’un être qui pouvait facilement lui arracher la tête, mais pour le reste, on n’avait jamais rien sans un peu d’action. Pas vrai?

La harpie avait haussé le ton, ce qui amusa la brune. Manifestement, elle n’était pas insensible à son charme naturel. Professeur Spencer? La brune eu un rictus mauvais. Ça va plutôt bien avec le bâton que vous avez dans le cul. Dit-elle alors qu’elle mettait un peu trop d’emphase sur le « vous ». Au moins, elle ne pourrait pas dire qu’elle n’est pas polie. Cette pensée l’amusa malgré la colère qui semblait s’emparer peu à peu de son être. Ça va comme ça? C’est assez respectueux pour sa majesté? ajouta-t-elle sur un ton cinglant. Comment cette grognasse pouvait la juger après à peine une rencontre, qui, avouons-le, n’était pas vraiment glorieuse. Bon, c’était un peu de sa faute, mais à voir comment elle l’avait traité en face de son mentor, la rouquine pouvait remercier Caleb d’avoir été là, sinon elle lui en aurait collé une.

▬ Chérie, c’est pas que je veux pas le reconnaître, c’est parce que j’en ai rien à foutre de toi. Lâcha sèchement la brune. Ce n’était pas sa meilleure répartie, mais c’était plus fort qu’elle. La sorcière avait tapé là où ça faisait mal en s’attaquant à sa nature. Peut-être qu’elle avait négligé un peu son apprentissage, mais ça, c’était loin d’être de ses affaires. Et puis, comment pouvait-elle la juger sans avoir la moindre idée de ses compétences? Et elle se permettait de lui soulever le fait qu’il fallait réfléchir avant de parler. Cette chipie devrait écouter ses propres conseils et fermer sa grande gueule de temps en temps.

Yesla serrait les poings à mesure que la rouquine déblatérait son poison, soulevant qu’elle n’avait de valeur que par sa lignée. La brune tentait de garder son calme, mais manifestement, c’était peine perdue. Les hostilités étaient déjà bien lancées et il ne lui semblait plus possible de faire marche arrière.

▬ Franchement! Tous ces abrutis qui prennent ton cours ont pas une once de capacité magique. Ils sont à la hauteur de ton cours, ça c’est clair. Répondit la brune sur un ton ironique, manifestement agacée par les commentaires de la rousse, ce qui était probablement dû au fait qu’il y a avait un fond de vérité. Yesla avait fini par prendre la magie un peu plus au sérieux depuis leur dernière rencontre, mais ça, elle préférerait mourir que de le lui avouer. Et c’était à peine exagérer. Cette Clarke avait le don de faire ressortir ce qu’il y avait de pire en elle.

▬ T’inquiètes pas, t’as gagné, je prendrais pas ton cours, je voudrais pas m’abaisser à leur niveau. ajouta-t-elle d'un ton cinglant alors qu’elle replaçait son sac sur son épaule. Il était hors de question qu'elle tolère la vision de cette grognasse de manière hebdomadaire.

Seul point positif de cette peste, elle avait eu au moins la patience et un minimum de respect pour ne pas m'interrompre. Ou alors, elle cherchait une répartie ? J'avais pu lui dire ce que je pensais d'elle, même si je n'aurais jamais du faire ça ici. C'était ma place que je jouait. Mais... vu ce qu'elle faisait depuis le début et semblait reprendre sitôt j'avais fini... Elle risquait gros avec Caleb en me parlant ainsi. C'était ça qu'on appelait la destruction mutuelle assurée, non ?

Le pire dans ses réponses, en plus d'être irrespectueuses, était qu'elles étaient la preuve de ce que j'avançais. Son rictus quand elle avait dit Professeur Spencer ? ou encore tout ce qu'elle avait dit après... Ça va plutôt bien avec le bâton que vous avez dans le cul... Ça va comme ça ? C’est assez respectueux pour sa majesté ?... Chérie, c’est pas que je veux pas le reconnaître, c’est parce que j’en ai rien à foutre de toi. Franchement ! Tous ces abrutis qui prennent ton cours ont pas une once de capacité magique. Ils sont à la hauteur de ton cours, ça c’est clair. T’inquiètes pas, t’as gagné, je prendrais pas ton cours, je voudrais pas m’abaisser à leur niveau. Tout ça ne faisait que confirmer mes dires.

Je n'avais rien dit pendant un long moment, je l'avais laissée déblatérer et prouver ce que je savais déjà. Ce que j'avais si clairement dit un peu plus tôt. Et j'avais fini par rire quand elle avait arrêté ses conneries.

« Tu ne fais que prouver ce que je disais... Tu en as conscience non ? NON, bien sûr que non. Tu réagis comme une enfant vexée dans son amour propre. Au lieu de dire des choses censées, vraies ou un tant soit peut réfléchies. Tu attaques sans fondement, tu nargues, tu te ridiculises... »

Je la regardais, la prenant de haut pour lui faire payer ce qu'elle avait dit sur mes étudiants, qui pour certains devaient être sorciers et des plus compétents ou assidus qu'elle. Et j'ajoutais :

« Tu voulais suivre mon cours, mais maintenant il est pas à ton niveau ? Est-ce que tu t'écoutes ? » Je riait, soufflant avec lassitude. Comment faisait Caleb pour la supporter ?

« Tu veux déprécier mes capacités, mon cours ? Si ça te fait te sentir bien de croire que je te suis inférieure... vas-y. Je sais ce dont je suis capable aussi bien niveau assiduité que magie pure. Mais c'est ça le soucis, n'est-ce pas ? Parce qu'en plus de t'être fait remettre en place par Caleb devant moi, tu sais que je suis ton opposée. Que je suis assidue dans la magie, que je développe mes capacités, que je suis puissante. Le hic, tu vois, Yesla... c'est qu'en m'insultant ou en insultant mes capacités magiques, tu ne m'insulte pas juste moi. Tu insulte également Caleb. Parce que... ce ne sont pas les seules différences entre toi et moi. La plus importante c'est que Caleb n'est pas seulement mon mentor, comme pour toi. Je suis de son sang ! Sa descendante. Alors, ta rivalité débile... garde-la pour toi. Parce que si je ne t'étais déjà pas supérieur niveau magie et assiduité... le concernant, je serais toujours de sa lignée, de sa famille. Tu ne fais tout bonnement pas le poids ! »

Je marquais une pause et ajoutais sèchement :

« Si tu es trop bête pour respecter un professeur. Utilise ton cerveau une fois au moins et respecte moi pour qui je suis en dehors de ça. Et surtout pour lui, et la magie qu'il m'a léguée. Ne déprécie plus JAMAIS mon héritage. Compris ? »

Apparemment que la brune devait avoir des talents d’humoriste, puisque sa seule réponse fut un ricanement moqueur. Selon ses dires, elle se ridiculiserait depuis tout à l’heure. Probablement qu’elle avait manqué un épisode, parce qu’elle n’avait pas l’impression de vivre la même chose que celle qui se faisait passer pour une génie de la magie. Attaquer sans fondement? Et puis quoi encore? Son existence était une putain d’attaque constante. Mais ça, elle ne devait pas s’en rendre compte, probablement dû au fait qu’elle se pensait supérieure à tout le monde. Yesla n’était même pas certaine qu’elle avait un foutu chat, comment pourrait-il tolérer un être aussi imbaisable. Qu’elle aille emmerder quelqu’un d’autre au lieu de lui crêper le chignon. Un démon par exemple, un très puissant. De quoi la faire disparaitre de la surface de la Terre.

La brune avait haussé les épaules avec nonchalance alors que Clarke soufflait avec lassitude, tentant avec pitié de lui retourner ses paroles contre elle. Apparemment que tout le monde pouvait se tromper. Comment avait-elle pu penser que cette connasse pouvait lui apprendre quoi que ce soit? Dans le meilleur des cas, elle aurait pu l’emmerder à chaque semaine, mais bon, ça aurait été réciproque… Malheureusement, ce qui était bon pour elle, l’était aussi pour l’autre. C’était d’une tristesse.

▬ Ouais, là-dessus on est d’accord et une foutue chance que t’es mon opposée, parce qu’être aussi barbante que ça tout le temps, j’aurais envie de me jeter devant un bus. Un petit indice de ce que tu devrais faire. Je pense pas que tu manqueras à quelqu’un avait fait la sorcière d’un ton qu’elle voulut cinglant, un petit sourire au coin des lèvres.

La brune avait tressailli lorsque Clarke avait prononcé le descriptif « puissante » à son égard. Peut-être qu’elle avait plus d’années d’expérience qu’elle, ça c’était certain, mais si Yesla n’avait jamais été d’un naturel motivé, elle comptait bien lui montrer de quoi elle était capable, et même si ça impliquait de dilapider tout son temps libre. Clarke avait ensuite enchaîné en parlant de son mentor, ainsi que du sien. Caleb.

▬ Je t’accord au moins cette seule qualité, c’est seulement dommage pour toi qu’elle vienne uniquement de Caleb. Même si ça me fait mal de le dire, au moins avec son sang, t’as un peu de valeur fit-elle alors qu’elle lui décochait un sourire condescendant. Mais ça suffira pas pour que j’te respecte lança-t-elle un peu plus fort, dans l’intention de se faire comprendre, alors qu’elle se dirigeait d’un pas las vers la porte de la classe. La sorcière avait d’autre chose de plus intéressant à faire que de se faire chier à décrire tout ce qu’elle détestait de cette fille. Au moins, elle pourrait être certaine que cette petite discussion productive resterait entre eux deux. Il fallait dire qu’elle avait, l’une comme l’autre, de quoi protéger leurs arrières. Le doyen de la faculté aurait probablement de quoi la renvoyer sur le champ si ce dernier apprenait leur précédent échange et Yesla pouvait dire adieu à l’aide son mentor si l’autre ouvrait sa grande gueule. Autant dire qu’il était dans leur intérêt de ne pas ébruiter la chose. Elles se tenaient mutuellement par les couilles. Au sens figurée du terme, bien sûr.

Ses attaques, malgré la manière dont je l'avais affichée, continuais dans le même registre. A défaut d'avoir réellement matière à m'insulter ou me dénigrer, elle attaquais sur des terrains futiles et de manière complètement risible. Elle osait me suggérer d'y passer et au lieu de me mettre en colère, cette fois, j'étais proche d'un rire incontrôlable. Pour le coup, cette attaque n'avait aucun impact, je me fichais de ce qu'elle pensait de moi. D'autant plus que j'étais persuadée qu'elle n'était partie la dessus, encore une fois, que parce qu'elle n'avait rien d'autre à dire. Elle m'aurais presque fait de la peine, si elle ne me sortais pas autant par les yeux.

« Le contraire m'aurait étonné... » Soufflais-je simplement. Je n'avais pas envie de répondre. C'était peine perdu et ses répliques n'en valait pas la peine. Elle était juste blessée dans son orgueil et trop fière pour admettre la défaite. Ça se voyait comme le nez au milieu de la figure. Mais je n'en avait plus rien à faire, clairement. Et alors que j’apercevais derrière le hublot de la porte de l'amphi la tête du collègue qui donnerait cours ici dans une demi-heure, j'avais saisi l'opportunité pour mettre un terme à tout ça.

« Mais tu sais quoi. Fais comme tu veux. C'est ce que tu sembles faire tout le temps. Même quand la raison dicterais le contraire. Moi, j'ai plus important et plus intéressant à faire. » J'avais posé une main plus ferme sur le sac qui pendait à mon épaule, puis j'avais tourné les talons et fait signe à mon confrère que je lui laissait la salle.